Tout ou presque sur le Covid-19 en 12 questions que vous vous posez ou pas
Quelle est la cause du Covid-19 ? Un virus à ARN, le SARS-CoV-2, présentant 80% d’homologie avec celui qui causa le syndrome respiratoire aigu en 2003, mais près de 96% avec le coronavirus RaTG13 récupéré sur une chauve-souris en 2013. Ce coronavirus de 2019 est traitre, il est contagieux avant les symptômes les plus spectaculaires, et cause des affections graves, parfois mortelles, chez des patients présentant la plupart des traits de fragilité. D’autres patients n’entrent pas dans ces catégories et sont pourtant gravement affectés. Ces cas sont rares mais ils suscitent la peur, car des gens apparemment en bonne santé, femmes, hommes entre 50 et 70 ans, sont décédés. On soupçonne alors des déficiences immunitaires révélées par ce virus. N’importe qui peut alors se sentir potentiellement en danger. Et paniquer en cas de contagion avérée, comme cela fut raconté par des témoignages personnels, de proches ou par médias interposés rapportant les propos de personnalités ayant connu cette situation. Le sexagénaire Patrick Bruel en fait partie et représente monsieur tout le monde.
Combien de Covid-19 ? En réalité, on peut dire qu’il existe deux formes d’affections causées par le SARS-CoV-2. La première est comparable à un banal rhume et les patients sont peu ou pas symptomatiques mais néanmoins contagieux. Le diagnostic de Covid-19 devrait être réservé aux patients affectés par une forme avancée de la maladie, avec des signes caractéristiques précurseurs, fièvre, agueusie, anosmie, toux sèche parfois accentuée, fatigue plus ou moins intense. Dans cette forme, les poumons sont atteints. Les scanners indiquent des lésions devenues caractéristiques de cette pathologie. D’autres atteintes ont été diagnostiquées. Rein, foie, pancréas, cardiopathie avec atteinte des cellules cardiaques endothéliales et vasculopathies, micro-coagulation, thromboses pouvant dégénérer en embolie.
Pourquoi la forme bégnine ? Les infections virales sans conséquences aggravées affectent les patients dont la réponse immunitaire adaptative, mobilisant cellule T, B, avec les anticorps classique, IgM et IgG. Des études sur quelques Japonais peu affectés ont montré la multiplication d’IgG plus rapide que les IgM, ce qui indique une défense immunitaire possédant une mémoire ancienne, comme si ces patients avaient rencontré un autre virus pouvant produire une immunité croisée. En règle générale, les réponses humorales adaptatives ayant réussi ont protégé les patients. On ne sait pas pourquoi des pays comme le Japon n’ont eu que si peu de décès, un millier, ce qui est extrêmement bas, pour un pays de 130 millions d’âmes avec une population vieillissante. Est-ce que l’alimentation et le microbiote ont joué ? C’est possible, d’autant plus que les Japonais consomment le natto, aliment fermenté contenant une souche de Bacillus subtilus qui sécrète des surfactines pouvant bloquer le virus et aussi la vitamine K en grande quantité. Il a été montré que la déficience en vitamine K est corrélée aux formes graves du Covid. La forme bégnine s’explique ainsi tout simplement, l’immunité fonctionne correctement la première semaine après la contagion et tout rentre dans l’ordre.
Pourquoi la forme grave ? La forme avancée plus ou moins sévère repose certainement sur une défaillance de l’immunité adaptative. Le Covid-19 avancée est alors une pathologie différente, de type immune, déclenchée par le virus. Autrement dit une sorte de sida très fulgurant, causée par une immunodéficience combinée par une immuno-efficience intempestive. Une inflammation généralisée est déclenchée, en commençant souvent par une atteinte pulmonaire. Le SARS-CoV-2 affole les défenses immunitaires innées. Il est « détecté » par les récepteurs TLR, sans doute de plusieurs types, et serait aussi un effecteur de la voie du complément, précisément celle des lectines, se liant aux protéines MBL avec la protéine d’entrée S mais aussi la protéine N. Lorsque le virus est détecté, les signaux de la réaction inflammatoire sont exprimés, les cytokines envoient des instructions aux cellules compétentes pour éliminer les tissus infectés, faisant alors énormément de dégâts. Macrophages et NK sont responsables des dommages occasionnés dans les alvéoles pulmonaires. C’est cette hyperactivation de l’immunité qui cause les dégâts inflammatoires sur plusieurs tissus, justifiant alors l’emploi de corticoïdes comme l’indique un résultat modeste ayant réduit d’un tiers les décès en réanimation. Un résultat commenté, salué par l’OMS mais qui n’a rien d’une avancée inédite. Cela fait un moment que des patients au bord de l’issue fatale sont traités avec un corticoïde, molécule connue pour réduire les excès de l’inflammation.
Pourquoi le Covid-19 est-il si sélectif ? Le Covid-19 affecte différemment les populations, avec des différences, homme et femme, fumeurs ou non, tranches d’âge, état de santé du patient, origines ethniques. Deux facteurs jouent. Une fois la pathologie immune activée, le sort du patient dépend de son état de santé. Le choc de l’inflammation s’ajoute aux faiblesses et c’est la comorbidité qui joue, comme cela est observé pour la grippe. Ces faits sont bien connus. En revanche, ce qui est énigmatique, c’est la transition entre l’affection respiratoire banale et l’affection immune qui caractérise le Covid-19 dans le phénotype avancé. Ce stade arrive lorsque les immunités et notamment l’adaptative, activées la première semaine ont échoué. La réaction immune s’intensifie et finit par s’aggraver progressivement ou alors reculer. Le tri se fait après la première semaine. C’est pendant cette période que les facteurs vont jouer. Les récepteurs nicotiniques sont connus pour activer l’immunité adaptative et c’est peut-être pour cela que les fumeurs sont préservés, sauf s’ils entrent dans le stade suivant et là, un poumon de fumeur n’est pas du tout un avantage. Les effets du microbiote sont aussi différenciant mais pas encore établis. N’oublions pas que le SARS-CoV-2 a aussi un tropisme entérique. Le microbiote peut jouer dans les deux sens, protecteur ou aggravant.
Le Covid-19 illustre parfaitement le principe « un patient, une pathologie ». Ce n’est pas le virus qui cause la maladie, il ne fait que l’initier. C’est le patient qui par son immunité défaillante devient affecté par la forme grave, immune, de cette maladie émergente en 2019. Le patient secrète la maladie. Le reste est une affaire de différences de toutes natures et notamment les facteurs d’ordre génétique ou épigénétique, ou alors l’état du système immunitaire, plus ou moins fatigué avec l’âge.
Une seconde vague est-elle possible ? La thèse d’une seconde vague reste du bricolage spéculatif. Il vaudrait mieux parler en termes de persistance du virus et de résurgences sous formes de clusters, avec ou non un retour de l’épidémie, localement, globalement, avec des possibilités de contrôle, de détection. On ne savait rien de ce virus avant qu’il ne produise ses effets, et on n’en sait pas plus sur la suite des effets. Le SARS de 2003 a disparu, comme le MERS, devenu pratiquement invisible. On ne voit pas comment le coronavirus de 2019 pourrait disparaître. En admettant qu’à la fin de l’été il y ait eu un million de décès dans le monde, compte-tenu d’une létalité évaluée à 0.5, cela nous ferait 200 millions de patients ayant été infectés. Honnêtement, il n’y a aucun argument laissant penser que le virus va disparaître compte tenu du nombre de gens infectés dans le monde. Des mesures drastiques pourraient le faire disparaître mais avant cela, l’économie et les sociétés se seront effondrées.
Trouvera-t-on un vaccin ? Selon les dires du professeur Raoult largement partagées, le coronavirus étant peu immunogène, il est vain d’espérer trouver un vaccin. De plus, les tentatives en ce sens réalisées sur le premier SARS se sont soldées par un échec. Encore faut-il préciser que ces expériences n’ont pas été vérifiées sur l’homme puisque le virus avait disparu. Il a juste été confirmé que le coronavirus est faiblement immunogène ce qui pose un problème pour trouver un vaccin réellement protecteur. Car faire produire des anticorps est une chose mais obtenir une protection en est une autre. Les patients gravement affectés ont produit des anticorps mais cela n’a pas été suffisant. En plus, un effet facilitant a été observé lors d’études in vitro. Ce qui signifie que dans certains cas, les anticorps peuvent accentuer la pénétration du virus et sa réplication. Il est plausible alors qu’une vaccination puisse être un Janus, protégeant les uns et rendant plus fragiles les autres. En plus, la possibilité d’apparition de mutations importantes, voire d’une nouvelle souche, pourrait compliquer redoutablement la situation.
Faut-il investir des milliards pour un vaccin ? Ce n’est pas certain mais si les Etats ont décidé de mettre les moyens, c’est pour répondre à un objectif autant d’ordre sanitaire que politique. L’Etat veut (re)prendre la main sur cette affaire sanitaire, puis montrer aux populations qu’il s’occupe sérieusement de la situation. Avec ces milliards mis sur la table, on ne pourra pas dire que les gouvernants se sont désintéressés de la situation. De plus, ces moyens permettent des effets d’annonce laissant espérer la mise au point d’un vaccin signifiant une chose importante, la possibilité de reprendre une vie « normale », débarrassée de la crainte virale, du moins pour ceux qui d’une part croient à la possibilité d’une mise au point rapide et d’autre part, pensent que plus on met de moyens, plus la solution est possible. La seule chose certaine, c’est que cet argent permet de faire travailler le monde de la recherche. On oublie un peu vite que le métier de chercher consiste en premier lieu à chercher. Le vaccin est devenu une question politique et c’est pour cette raison que des entrepreneurs se prenant pour des bienfaiteurs de l’humanité investissent eux aussi. Al Gore a investi dans le climat et Bill Gates s’occupe des vaccins depuis quelques années.
Trouvera-t-on un traitement ? Soyons honnête, les essais thérapeutiques n’ont pas montré d’effet massif sur le développement de la maladie. Une réduction des cas graves et mortel d’un facteur 5 à 10 aurait représenté un succès indéniable. La réalité est toute autre. La chloroquine n’a un effet que modeste, comme du reste la dexaméthasone utilisée chez les patients proches de l’issue fatale. Il est possible de sauver des vies mais pas de réduire d’un facteur significatif la létalité. L’azithromycine seule n’a pas fait l’objet d’essais conséquents et son effet reste incertain, imputable à ses propriétés anti-inflammatoires. La piste antibactérienne reste ouverte mais si elle était prometteuse, cela se saurait. Les antiviraux n’ont guère d’efficacité mais on s’y attendait. C’est comme le tamiflu, sorte de potion magique qu’on propose pour la grippe mais qui n’est guère efficace, pas plus que le sont le remdésivir ou le favipiravir. Trouver un antiviral est un graal en infectiologie. C’est comme trouver un anticancéreux efficace, capable de réduire considérablement les décès causés par ces pathologies dégénératives. La recherche de thérapies antivirales est dans l’impasse. Il n’y a pas de solution ou s’il y en a, les chercheurs ne regardent pas au bon endroit.
Le SARS-CoV-2 peut-il muter et générer une nouvelle souche ? En fait, il ne fait que muter depuis son apparition et ce phénomène est classique pour un virus à ARN qui accumule les erreurs. Plus de 10 000 mutations d’acides aminés ont été détectées, affectant toutes les protéines virales, structurales ou non. Au final, certains types ont accumulé une dizaine de mutations ou un peu plus, sans que la souche ne soit modifiée. Ces mutations ont été repérées sur les échantillons prélevés dans le monde. Leur détection repose sur les analyses de séquence effectuées et qui sont plus lourdes que les tests PCR. Une mutation a attiré l’attention des virologues, c’est la D614G affectant la protéine S. Un aspartate est remplacé par une glycine mais elle ne produit pas une nouvelle souche, juste un embranchement d’où sont issus des centaines de types. Cette mutation remonte d’après l’horloge mutationnelle à la mi-janvier, sans doute à Wuhan, dans le premier foyer épidémique. Elle a produit un nombre considérable de descendants sur les six continents ce qui laisse penser à une contagiosité plus importante mais ne laisse rien présager d’une agressivité augmentée. L’explication simple étant que cette mutation affectant la partie de Spike qui se lie au récepteur ACE2, le virus pénètre plus aisément.
Reste à savoir si une nouvelle souche pourrait apparaître ces prochaines années. On sait une chose, c’est que deux coronavirus saisonniers circulent depuis plus de cinquante ans, le H-CoV-229E et le H-CoV-OC43. Le SARS-CoV premier fut détecté fin 2002 et occasionna le SRAS, maladie émergente redoutable et redoutée, puis il disparut. Deux autres virus saisonniers sont apparus en 2004 et 2005, peu agressifs, sans lien avec le précédent. Le MERS-CoV a circulé au Moyen-Orient sans être très contagieux mais très létal. S’il est plausible qu’un nouveau coronavirus apparaisse, nul ne peut anticiper sa date de naissance, son origine, sa séquence, son agressivité, sa contagiosité. La Nature nous échappe, elle joue avec les informations et ce jeu échappe actuellement à la science, tout aussi impuissante à comprendre les maladies du siècle que sont le cancer et Alzheimer.
Dans quelle direction doit aller la science ? L’une des priorités importantes, c’est de connaître la propagation du virus et d’étudier les facteurs faisant que des villes, des régions, des pays, sont gravement impactées alors que d’autres lieux sont préservés. Ces recherches sont en cours et les épidémiologistes sauront nous éclairer prochainement. La clinique est aussi d’une grande importance, pour établir les paramètres de la pathologie, comprendre les différences de gravité, analyser les paramètres immunitaires, notamment en suivant les patients ayant rechuté deux mois après la maladie, sans que la charge virale puisse l’expliquer. Ces patients affichent sans doute une déficience immune aggravée ou déclenchée par l’infection virale. Le reste est une affaire théorique spéculative. La science contemporaine a été dépassée par le phénomène mais elle l’était déjà pour d’autres pathologies liées à l’immunité et aux communications intercellulaires. Un nouveau paradigme est nécessaire. Il l’était avant le Covid. Il n’est pas certain que les scientifiques aient pris conscience de cette nécessité, ni de l’utilité de développer des approches réellement transversales. Et aussi de penser à un nouveau paradigme mettant au centre l’information dans tous ses aspects, notamment comment elle se propage, sert à communiquer, est sélectionnée, interprétée. Ce paradigme est actuellement embryonnaire. On le trouve avec la biosémantique, avec des développements dans mon second essai de 2017 (Dugué, Temps émergences et communication, Iste)
Le Covid-19 est-il si nouveau ? Non, car il repose sur des « déficiences immunitaires » et partage quelques caractères avec d’autres pathologies, des caractères qui n’ont pas le même timing ni le même mécanisme infectieux puis inflammatoire. Une inflammation que l’on retrouve dans l’infection VIH, le lupus ou encore la mononucléose infectieuse causée par un virus à ADN, le EBV (responsable également de l’herpès). La mononucléose infectieuse présente des évolutions similaires, avec une infection en deux stades, comme pour le Covid. La plupart des patients infectés par le virus d’Epstein-Barr qui finissent avec les symptômes de la mononucléose développement une réponse adaptative, avec IgM et IgG, et des symptômes bénins, angine, lymphoïdite, monocytose… Mais une minorité ne parvient pas à résoudre l’infection et la réponse immunitaire s’emballe au bout de quelques mois, causant les symptômes de la mononucléose aggravée, avec fièvre, fatigue et parfois, des séquelles observés les mois suivant la crise aiguë. Le tableau clinique de la mononucléose ressemble à celui du Covid-19 avec une séquence temporelle élargie, un à six mois. Les formes bégnines sont majoritaires avec des formes aggravées à des degrés variables. Le EBV cause une pathologie grave chez les patients dont la réponse immune ne fonctionne pas correctement et en ce sens, il ressemble au SARS-CoV-2. En revanche, la séquence immunopathologique est spécifique, implique d’autres cellules immunitaires et conduit vers un tableau clinique sensiblement différent.
Le virus Epstein-Barr, causant mononucléose et quelques cancers, est censé avoir infecté 95% de la population. Il représente un problème de santé publique sérieux mais néanmoins mineur, comparable à la rougeole. Il affecte les populations jeunes et façonne sans doute une immunité pour les plus âgés. Il se pourrait bien que le SARS-CoV-2 devienne endémique comme le EBV.
Pour compléter, ces trois études scientifiques détaillées
https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/sars-cov-2-bientot-5000-mutations-223151
https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/nouveau-modele-transversal-du-224084
https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/covid-19-et-pathologie-immune-224695
Esquisse d'un nouveau paradigme
https://iste-editions.fr/products/temps-emergences-et-communications
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