Les communes financent les écoles privées
Vous ne le saviez peut-être pas mais le code de l’Education oblige les communes à financer des écoles privées. La loi du 13 août 2004 a renforcé le principe et des circulaires d’application sont intervenues pour garantir le respect de cette obligation. Seulement voilà, le CNAL (Comité national d’action laïque) s’oppose à la loi au nom de la laïcité.
La loi fait obligation aux communes de contribuer aux dépenses des écoles privées élémentaires sous contrat d’association.
Description de la législation applicable :
L’article 89 de la loi du 13 août 2004 sur les libertés et les responsabilités locales a rendu obligatoire le financement de la scolarité d’enfants inscrits dans l’école privée d’une commune, dont ils ne sont pas résidents, par leur commune de résidence.
Cet article, qui fixe les conditions de calcul des contributions des communes de résidence, n’a fait en réalité que confirmer une disposition déjà applicable du code de l’Education (l’article L. 212-8) qui prévoit que la répartition des dépenses de fonctionnement entre la commune d’accueil et la commune de résidence se fait par accord entre ces deux communes. Mais en l’absence d’accord entre les communes, la participation de la commune de résidence restait facultative. La loi de 2004 a corrigé les choses : désormais, même en cas de désaccord, la participatin est due.
Des garde-fous sont prévus : la commune de résidence ne doit pas verser une contribution supérieure par élève à celle qui lui incomberait si l’élève concerné était scolarisé dans une école publique. Elle ne peut pas non plus verser un montant de participation inférieur au montant affecté aux élèves scolarisés dans une école publique d’une autre commune.
Le CNAL fait un recours au nom du principe de laïcité :
La mise en oeuvre de ce dispositif a fait l’objet de la circulaire interministérielle du 2 décembre 2005. Mais, saisi d’un recours, le Conseil d’Etat a annulé cette circulaire (par son arrêt du 4 juin 2007). L’annulation ne concerne cependant pas la légalité même de la circulaire ; elle est prononcée pour cause d’incompétence d’un signataire. Très facile donc pour le gouvernement d’en faire une autre, et c’est ce qu’il fait le le 27 août 2007. Le CNAL (Comité national d’action laïque) a formé un recours devant le Conseil d’Etat contre cette seconde circulaire. Il en explique les raisons sur son site où l’on peut consulter un diaporama explicatif ainsi que le même document sous format pdf. Voir le site de la CNAL ici.
Le CNAL et l’AMRF (Association des maires ruraux de France) tiendront d’ailleurs une conférence de presse commune le 15 novembre 2007 au siège du CNAL à Paris pour évoquer le recours déposé.
Des parlementaires questionnent le gouvernement :
Plusieurs parlementaires de bords différents ont évoqué la question de l’article 89 contesté sous forme de questions écrites au gouvernement et ils ont fait part de leurs inquiétudes.
Pour Gisèle Printz, il n’est pas normal que les communes payent même lorsqu’elles sont sous contrat d’association car les petites communes peinent déjà à entretenir leur école publique. Les maires voient également remises en cause les démarches qu’ils ont accomplies en matière de regroupement intercommunal, pour maintenir une école publique.
Maurice Leroy déclare que cet article ne remédie pas au problème. Il favorise doublement les écoles privées concernées. La commune de résidence doit financer à deux reprises les droits de scolarité, pour les enfants de sa propre école et pour les frais de scolarité des enfants fréquentant une école privée d’une autre commune.
Albert Facon dit que "cette circulaire contient des dispositions qui auront de lourdes conséquences telles que : l’augmentation importante des coûts de scolarisation, l’obligation de financement imposée aux communes de résidence, des difficultés dans la gestion municipale, des risques de tensions entre l’enseignement public et les écoles privées".
Maxime Gremetz, lui, "redoute que la disparité de traitement instaurée entre l’enseignement public et privé ravive les tensions autour de la question scolaire et que les écoles privées exercent une concurrence déloyale de nature à menacer voire réduire rapidement à néant les efforts engagés par nombre d’élus républicains pour maintenir et promouvoir le service public d’éducation".
Les questions posées ont toutes reçu une réponse stéréotypée qui se veut rassurante sous la forme d’une récitation de la législation applicable par le ministre qui assure que deux principes fondamentaux sont respectés : la liberté de l’enseignement qui garantit aux parents de choisir librement l’établissement où ils souhaitent inscrire leurs enfants, le principe de parité énoncé à l’article L. 442-5 précité et repris à l’article 89 de la loi du 23 avril 2005. Il précise que dans l’attente de l’interprétation de la portée respective de ces deux principes par le juge administratif dans le cadre des contentieux en cours, une réunion de concertation s’est tenue à l’initiative du ministère de l’Intérieur avec les principaux partenaires intéressés et a permis d’établir un mode opératoire.
On voit bien que cette question de financement des écoles élémentaires privées par les communes est délicate et complexe. Il paraît difficile de trancher dans un sens ou dans l’autre. Invoquer le seul principe de laïcité ne constitue pas une réponse en soi aux problèmes concrets qui se posent localement. Mais ouvrir ainsi une brèche en permettant des financements d’écoles privées n’est pas vraiment conforme au principe d’une république laïque.
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