Présidentielles 2022. Mauvaises humeurs
Prenons garde à l’effacement de ce qui dans une république démocratique normale est essentiel.
Normale au sens de qui répond aux normes de fonctionnements démocratiques et donc pour nous à l’histoire et l’expérience accumulées et héritées depuis 230 ans, aux capacités d’un pays de citoyens éduqués et disposant de moyens d’expression et de communication variés et efficaces et d’une tradition de participation au vote encore vivace il y a peu, à la dimension d’une vie humaine.
L’essentiel, ce serait l’honnêteté de proposer et de débattre d’un bilan du mandat au regard des engagements pris et des circonstances rencontrées. L’occasion d’un diagnostic partagé de la situation du pays. Quelle entreprise humaine engageant toute une collectivité et ses moyens peut s’en passer raisonnablement ? Et bien sûr, la définition des grandes orientations politiques proposées et le choix de la méthode et des moyens requis.
Au vu de ce que nous vivons depuis plusieurs mandats et campagnes électorales les ayant précédées, ma pauvre observation et proposition apparaît aujourd’hui en France comme le conte de fée d’un qui serait sérieusement perché. En France mais pas dans tous les pays en Europe. Desquels nous sommes les partenaires pour travailler et décider de notre avenir commun. Qui nous observent, jouent leur jeu en n’oubliant pas leurs intérêts ni comment se rassembler pour les défendre, ce qui est bien normal. Avec le paradoxe d’avoir le chef de l’exécutif chez nous qui concentre le plus de pouvoirs sans réels contre-pouvoirs dans son pays en ayant besoin de vieilles institutions bricolées pour légitimer sa non représentativité politique chez lui. Chargé de nous représenter au Conseil Européen parmi les 26 autres exécutifs.
Par bonheur, dans un monde moderne, des amortisseurs comme les sondages ou cotes de confiance et autre baromètre de la bonne humeur civique donnent le change et protègent le monarque et son entourage de cette crudité politique.
Nous sommes dans une impasse politique, tout le monde le sait et bien sûr au premier chef nos partenaires européens, mais ce n’est pas le sujet de l’élection présidentielle. La prolongation artificielle de cette fiction institutionnelle ne serait pas possible sans l’excellence de notre système d’information indissociable maintenant d’un système médiatique globalisé. Dans lequel nous sommes le peuple européen qui a le moins confiance (taux de confiance= 25%). Système dont la vie démocratique a encore assez récemment était améliorée par son quasi contrôle remis dans les mains de quelques milliardaires. En toute légalité par le jeu naturel du marché.
Au fond, je viens d’expliquer le déroulement prévisible de l’élection présidentielle en cours. De dire qui sont les véritables acteurs en capacité de mener la danse et l’agenda et d’imposer leurs thématiques. Et d’induire quelles sont les questions qui en découlent. Non de la volonté des acteurs précités qui ont d’autres urgences et priorités mais d’une forme de mauvaise conscience politique qui nous habite de nous être laissés ainsi démocratiquement saucissonnés petit à petit. Avons-nous une issue politique démocratique ? Voulons-nous une issue politique démocratique ? Et pour quoi faire ? On pourrait, on aurait pu depuis longtemps poser ces deux questions à la classe politique et aujourd’hui à chacun des candidats et peser les réponses.
Au fond, à regarder et entendre ce qui nous est montré par les médias (ce sont quand même eux dans nos sociétés les plus grands producteurs et agents électoraux), ce n’est pas vraiment le sujet et ils en ont bien d’autres pour nous occuper l’esprit.
Nous sommes en fait une démocratie fondée sur le droit qui est globalement respecté. Il est pour l’essentiel mis en œuvre par les administrations qui le font vivre et le font appliquer. C’est un outil puissant constamment renouvelé et développé par des élus politiques en dehors de nous mais qui nous touche directement sans que l’on puisse s’y dérober ni en discuter. Heureusement nous savons ce que nous pensons ou plutôt quoi penser grâce aux sondages et enquêtes d’opinion dont la signification nous est expliquée par nos incontournables, omniprésents et bienveillants journalistes et spécialistes des médias. Encore un effort et au fond nous pourrons gagner du temps en nous passant de ce fastidieux et archaïque brassage de bulletins et de ses surprises et aléas.
C’est l’état de droit. Indépassable paraît-il dans une démocratie. C’est l’état de droit certes mais où sont dans cette affaire les droits politiques du citoyen avec des institutions et un mode de scrutin qui consacre un élu dès lors qu’il réussit à capter au 1er tour 20% des voix ? Pourquoi est-ce indispensable que la moitié sociologique du corps électoral ne soit pas représentée à l’Assemblée Nationale qui vote le droit et est censée contrôler l’activité des administrations et du gouvernement ? Serait-ce inévitable que plus de la moitié du corps électoral ne trouve pas utile de s’exprimer. Vu la réflexion et l’énergie déployée sur le sujet par les responsables politiques, serait-ce une fatalité ou une opportunité ? Qui en Europe peut en faire autant à part nous ? Nous méritons la médaille d’or de la démocratie.
On peut présumer que les 20% en question n’ont pas du tout envie de changer de système électoral et d’institutions. Mais nous, devons-nous nous résigner à descendre marche après marche la condition de citoyen qui nous relie ou ne serait-ce qu’un fantasme consolateur nécessaire parce que les êtres humains pour vivre et aussi perdre leur vie à l’occasion ont besoin de mythes ?
Et visiblement nous n’avons pas fini d’être surpris. Nous nous interrogeons actuellement sur un présumé candidat, censé revendiquer un bail de 5 ans avec les droits conférés non négligeables à la remise des clefs, et nous avons un président du Conseil de l’Union européenne, doté d’un visa de 6 mois qui déborde du calendrier légal de sa responsabilité initiale, visa auquel il a tenu expressément tout fraîchement nommé dès 2017 (il faudra qu’un jour on nous explique l’efficacité et la cohérence de ce dispositif).
Ce présumé candidat tente d’habiter en même temps une fonction qu’il doit remettre en jeu dans 7 semaines et une autre dont deux leaders énigmatiques de deux puissances déterminées poursuivant leurs propres objectifs n’ont pas grand-chose à faire si ce n’est de l’instrumentaliser dans une partie d’échec dont nos pays sont les cases forcément bicolores même si au fond personne n’est vraiment sûre de la couleur de toutes. Avec tous les matins des journalistes qui nous expliquent que la guerre qui devait avoir lieu la veille est reportée de façon imminente.
Je crois qu’en tant que citoyens, il serait temps que nous reprenions les choses en mains avant que de trop grosses bêtises finissent par arriver. Après tout, sans nous, ce pays ne vit pas.
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