À Michel Onfray, au sujet de votre dernier ouvrage « Décadence »
Votre dernier ouvrage "Décadence" aura le mérite, je l'espère, de réveiller un magistère de l'Église qui reste figé dans ses dogmes. En revanche, il est dommage que vous ayez choisi de reprendre la thèse mythiste plutôt que celle que j'ai développée dans mes ouvrages. Ce n'est pas le corps qui importe, c'est l'esprit.
C'est ainsi que vous prenez à la lettre les récits de l’enfance de Jésus en le qualifiant de sale gamin et de tête à claques (page 53). Ou bien, vous considérez ces récits de l’enfance comme médiévaux et il n’y a aucune raison d’y porter foi et d’en faire un argument, ou bien vous les considérez comme authentiques, il faut alors les interpréter comme des textes pescher, ce que je fais.
En effet, ces textes ont été rédigés et doivent être lus suivant deux sens : un sens littéral dit de surface et un sens caché, profond, qui relate la réalité historique.
Comme je l'explique dans mes ouvrages, Nazareth était la capitale de la Galilée. Ce sont les Romains qui lui ont donné le nom de Sepphoris. Non loin de là, Bethsaïde au bord du lac de Tibériade, Gamala sur la hauteur, étaient sous son autorité. C'est ce que nous disent la géographie et l'histoire de la région. Mais pour un essénien, Nazareth est une cité-mère, Betsaïde/Gamala est, pour ainsi dire, une de ses filles. À Nazareth siège un conseil essénien. Il s'appelle Joseph, étant descendant des prêtres Joseph d'Égypte. Jésus est le conseil essénien de Bethsaïde/Gamala. Il est, pour ainsi dire, fils de Joseph. Revenons au texte de mon précédent article : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/pourquoi-l-image-de-l-hostie-que-219582
...Profitant de la dissension qui était apparue entre Joseph et Jésus, Zachée (le représentant de l'administration romaine) intervint. Il dit à Joseph : « Ton enfant est d'une maturité étonnante pour son âge. Confie-le moi (accepte qu'il passe sous mon administration directe). Je lui apprendrai toutes les lettres et beaucoup d'autres choses et en particulier à respecter les Anciens (les vieilles cités telles que Nazareth) et à vivre en bonne intelligence avec les autres enfants (avec les autres cités et colonies voisines). »
Zachée enseigna toutes les lettres à Jésus. Mais celui-ci, le regardant droit dans les yeux, lui dit : « Toi qui ignores la nature même de la lettre Alpha, comment peux-tu enseigner aux autres la lettre Beta. » Comme Zachée ne pouvait donner de réponses satisfaisantes concernant la nature de la première lettre de l'alphabet, Jésus lui expliqua tout (le sens de l'origine suivant les textes de l'Ancien Testament et le sens de la fin).
Honteux de lui-même, Zachée s'en retourna vers Joseph et lui dit : « Frère, reprends chez toi cet enfant, car je n'arrive pas à savoir qui il est. Je ne connais ni son commencement ni sa fin » (je ne connais pas bien l'histoire du peuple juif et je ne comprends rien à son judaïsme). Et comme des Juifs bien intentionnés essayaient d'expliquer à Zachée la complexité des choses, Jésus s'écria : « Voilà que le fruit fructifie et que les aveugles commencent à voir. Que l'on sache qu'après avoir abaissé, je relève. C'est pour cela que je suis venu....
Nous avons là, en résumé, l'histoire d'une tentative pacifique de romanisation (par Zachée) à laquelle l'autochtone (Jésus) veut bien collaborer mais à condition de conserver ses valeurs juives ancestrales.
... Joseph donna à Jésus un maître qui voulut lui enseigner d'abord les lettres grecques avant les lettres hébraïques (un helléniste), sans succès.
C'est alors qu'un autre maître, parent et ami de Joseph (un judaïsant), proposa ses services. L'enfant en fut rempli de joie. Entrant avec assurance dans l'école juive, il vit un livre à terre (l'Ancien Testament foulé aux pieds par une génération sans foi ni loi). Sans l'ouvrir, uniquement inspiré par le Saint-Esprit, il expliqua la Loi à tous ceux qui se trouvaient là.
Lui ramenant Jésus, le maître dit à Joseph : « Frère, reprends ton enfant car il est rempli de grâces et plein de sagesse. » Et aussitôt, parce que le maître (judaïsant) avait bien parlé, le maître (helléniste) fut guéri par Jésus... (extraits de mon Histoire du Christ, tome 2, chapitre 20).
Zachée dans l'évangile de Luc, 19, 1 (traduction Tresmontant), je cite :
et il est entré (Jésus) et il a traversé iericho
2 et voici un homme par son nom appelé zakkaï
et lui il était le chef des percepteurs de taxes
et lui [il était] riche
3 et il cherchait à voir ieschoua [pour savoir] qui c'est
mais il n'y arrivait pas à cause de la foule du peuple
parce que par la taille il était petit
4 alors il s'est mis à courir en avant
et il a grimpé dans un sycomore pour le voir
parce que c'était par cette [route-là] qu'il allait passer
5 et lorsqu'il est arrivé à l'endroit [en question]
alors il a levé les yeux ieschoua et il lui a dit
zakkaï hâte-toi de descendre
car aujourd'hui dans ta maison je vais demeurer
6 et alors il s'est hâté de descendre
et il l'a reçu dans la joie
7 et ils l'ont vu tous les gens [qui étaient là]
et ils se sont mis à protester et ils ont dit
c'est chez un homme coupable
qu'il est entré pour passer la nuit
8 alors il s'est tenu debout zakkaï
et il a dit en s'adressant au seigneur
voici que la moitié de ce qui est à moi
rabbi
c'est aux pauvres que je le donne....... sous-entendu : aux esséniens
et si à l'encontre de quelqu'un
j'ai commis une escroquerie
je rends quatre fois [ce que j'ai pris]
9 et alors il a dit en s'adressant à lui ieschoua
aujourd'hui le salut à cette maison est venu
puisque de fait lui aussi il est un fils d'abraham
10 car il est venu le fils de l'homme
pour rechercher et sauver ce qui est perdu.
Ce qui est perdu sont les Juifs de la diaspora. Ils sont fils d'Abraham comme le sont les Juifs de Galilée, mais ils ont oublié les textes sacrés. Les Romains les ont intégrés dans leur administration et même dans leur armée (légion Alauda des alouettes). Jésus leur propose une coopération.
Hélas ! Ne serait-ce là que de bonnes intentions ? L'historien Flavius Josèphe nous apprend dans ses ouvrages qu'à la mort d'Hérode, un certain Judas de Gamala se souleva contre les Romains en l'an - 4, curieusement l'année où Jacques, dans son proto-évangile, annonce qu'un Jésus vengeur est né... à moins que le conseil de Gamala ne se soit scindé en deux entre un Judas résistant et un Jésus plus collaborateur ?
Page 77, vous écrivez : "Amenez ici mes ennemis qui n'ont pas voulu que je régnasse sur eux et égorgez-les en ma présence" (Luc, 19, 27). Il s'agit d'Archelaos, fils et héritier d'Hérode le Grand. Il s'était rendu à Rome pour se défendre des accusations que ses adversaires portaient contre lui pour qu'Auguste ne lui donne pas tout le territoire auquel il avait droit. Flavius Josèphe dit qu'à son retour, il se montra particulièrement cruel. Il ne s'agit pas de Jésus comme vous l'écrivez aux pages 77 et 202.
Page 127. Reprenant une interprétation erronée, vous situez la vision de Constantin à Gand. Non ! cette vision est à situer à Chalon-sur-Saône. https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/extraits-d-ouvrages/article/la-vision-de-l-empereur-constantin-32809.
Autre texte Pescher
Protévangile de Jacques, plus exactement "Nativité de Marie, Révélation de Jacques". (texte écrit à la mort d'Hérode, vers l'an -4, extrait.). Vous l'évoquez de la page 47 à 53 dans une autre version.
...Il existait un certain Joachim fort riche que la nature avait comblé de tous ses bienfaits. Il ne lui manquait qu’une chose. Il était en effet le seul juste à ne pas avoir engendré de postérité à Israël, car sa femme, Anne, était stérile.
Qui était Joachim ? C’est le nom du dernier roi de Juda avant l’exil à Babylone. Anne, population galiléenne parmi d'autres, son épouse, n'enfantait pas de lui.
Alors, Joachim partit dans le désert et durant 40 jours et 40 nuits, il jeûna (I, 4).
C’est spirituellement qu’il faut comprendre car une terre étrangère - Babylone - ne peut être qu’un désert spirituel. Car la vraie nourriture ne peut être que celle que Dieu transmet à son peuple depuis Jérusalem.
Vint le grand jour du Seigneur, et les fils d'Israël apportaient leurs présents. Or Ruben se dressa devant Joachim et dit : " Tu n'as pas le droit de déposer le premier tes offrandes, puisque tu n'as pas eu de postérité en Israël ..."
Et voici que deux messagers frappèrent à la porte de la maison, disant : « Anne, Anne, ton mari Joachim descend de la montagne avec ses troupeaux (les exilés de Babylone reviennent en Israël). Un ange lui est apparu et lui a dit que tu concevras dans ton sein. » Et Anne courut à la porte, et elle accueillit Joachim. Neuf mois après, Marie naquit (4, 2)...
Dans cet étonnant symbolisme, quel est le présent que Joachim ne donnait pas mais que finalement il donna en la personne de Marie ? Qui est Marie ? Réponse : Marie est le nom du contingent de jeunes patriotes que la Galilée, après avoir hésité, se décida finalement à envoyer à Jérusalem pour participer à la construction du temple d'Hérode. L'effectif prévu codé de ce présent était de 122 agneaux, veaux et chevreaux... A noter que l’effectif de la première communauté pré-chrétienne qui s’est installée à Jérusalem était d’environ 120 (Act 1, 15)...
... Marie demeurait dans le temple du Seigneur telle une colombe et elle recevait sa nourriture de la main d’un ange.
Question : pourquoi Marie demeurait-elle dans le temple du Seigneur ? Parce qu’elle (ils) y travaillait (tout en priant). Pourquoi recevait-elle sa nourriture de la main d’un ange ? Parce que de la nourriture (spirituelle) lui (leur) était donnée.
Quand Marie eut douze ans, les prêtres tinrent conseil et dirent : « Que ferons-nous d’elle pour éviter qu’elle ne souille le sanctuaire du Seigneur ? »
Question : pourquoi les prêtres décidèrent-ils de l’éloigner en la confiant à Joseph ? Probablement parce que ces travailleurs esséniens faisaient aussi du prosélytisme, d’où tension notamment avec le pouvoir pro-romain d’Hérode, d’où risque d’effusion de sang dans le temple (Marie avait 12 ans, l’âge de la menstruation).
Les jeunes gens qui, selon l'historien Flavius Josèphe, décrochèrent l'aigle d'or du fronton du temple où Hérode l'avait mis ne serait-ce pas eux, jeunes Galiléens, et d'autres jeunes gens originaires de Judée ? D'où la répression, d'où la fuite des rescapés, les uns vers les montagnes de Judée, Jean, fils d'Élisabeth, population de Judée, et de Zacharie (ses prêtres qui officiaient dans le temple)... les autres, Marie, jeunes Galiléens, vers la Galilée ? Marie est donc repartie à Nazareth où elle a épousé Joseph. Bref...
... Marie est le nom que se donnait la population sainte d’Israël, plus précisément la partie qui se fixait la mission, en quelque sorte, d'engendrer le messie espéré. Exemple : la Marie des fresques de Gourdon, mère du messie Cleopas ; la Marie de Magdala qui a (mal) enfanté Tibériade, la Marie de Nazareth, mère de Jésus dans l’Évangile ; la Marie de l’évangile de Luc, soeur de Marthe, qui écoutait et lavait les pieds de Jésus. Enfin, dans le Protévangile de Jacques, la colonie envoyée par la Galilée à Jérusalem pour travailler à la construction du temple d’Hérode ...
Marie, c'était déjà Myriam, la population sainte d'Israël qui est sortie d'Égypte.
C'est d'elle que devait naître Jésus...
Qu'est-ce qu'une prophétie juive ?
Rien à voir avec les prophéties de Nostradamus. Le meilleur exemple est la prophétie de Daniel. Il s'agit, de toute évidence, d'un appel au soulèvement adressé sous ce nom code aux juifs déportés à Babylone contre un Nabuchodonosor devenu Balhazar. Profitant de son affaiblissement militaire face à Cyrus, la prophétie était facile à faire et avait pour but d’activer le souffle révolutionnaire des Juifs en exil.
Le texte se continue en faisant prophétiser par ce même Daniel, apparement depuis Babylone, la chute du roi séleucide honni Antiochos. qui eut lieu 400 ans plus tard (prophétie facile à faire si le rajout au texte s'est fait après coup). Le texte continue par une grande guerre ultime, avec toutes ses phases de mobilisation et d'action, qui se termine par la grande victoire du Dieu d’Israël sur l’ensemble des armées païennes gréco-romaines suivie de l'arrivée du Messie (cf. Bible et textes esséniens). Il s'agit là, en réalité, d'un projet de guerre qu'un mouvement juif divinement inspiré demandait aux Juifs d'accomplir tout en le prophétisant...
Hélas ! cette fin de prophétie - voeu pieux - ne s'est pas réalisée. En 70, ce n'est pas Rome qui a été détruite mais Jérusalem. Elle nous révèle toutefois comment un mouvement juif divinement inspiré cherchait à donner un sens à l'Histoire... en le prophétisant, tout en demandant aux Juifs d'accomplir la dite prophétie.
Premier évangile, l'évangile de Jean répond à cette logique. Il demande à sa communauté essénienne de proclamer ses valeurs juives face à l'occupant romain jusqu'à mourir sur la croix tout en invitant le fils de l'homme, qui est dans le ciel et dans la communauté qu'il anime, à se révéler en gloire. Yahvé était dans le peuple d'Israël. Jésus est dans la communauté sainte... en esprit. S'est-il révélé en corps dans le dernier évangile, celui de Matthieu ? L'évangéliste ne l'affirme pas mais n'exclut pas cette éventualité. https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/jesus-christ-pourquoi-il-faut-201902
... Mon "Histoire du Christ, tome II", page 196, publié en 1996.
Emile Mourey , 21 décembre 2019
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