5 bonnes raisons d’apprendre l’arabe
Le rapport publié au début du mois de septembre par l'Institut Montaigne préconisait l'apprentissage de la langue arabe au collège, afin de permettre aux jeunes issus de familles arabophones d'avoir un enseignement de l'arabe républicain et éviter qu'il ne soit exclusivement dispensé par des prédicateurs ou des associations sur lesquels l'État n'exerce pas de contrôle. Une sage proposition, certes. Mais elle néglige un détail qui n'en est pas un : l'apprentissage de la langue arabe ne saurait être cantonné à une mesure sociale pour jeunes banlieusards défavorisés. Une telle transcription de cette proposition crée un inévitable clivage parmi une frange de la population susceptible d'y voir une compromission de l'État face à de prétendues menées immigrationnistes, voire une expression du fameux "changement de population" que les milieux dextrogyres fantasment depuis maintenant quatre décennies. Non, l'arabe n'est pas un parler de déracinés et de vaincus à prendre par la main mais une grande langue internationale de financiers, de scientifiques et de poètes - il doit par conséquent être enseigné comme tel : à l'instar de l'anglais, de l'espagnol ou de l'allemand, sans paternalisme mièvre.
De par sa richesse et sa portée universelle, la langue arabe s'adresse à tous : y compris à ceux qui n'ont aucun lien familial avec les pays arabophones. Connaître une langue aussi sophistiquée et logique ne peut que "booster" le CV de nos jeunes pour lesquels il est de plus en plus difficile de trouver un emploi, même avec de solides connaissances en anglais. L'assimilation de la langue arabe leur ouvre la porte sur un riche univers culturel et esthétique inexploré qui ne demande qu'à être découvert : voilà de quoi réenchanter une génération désillusionnée dont la curiosité semble avoir été anesthésiée par les smartphones.
Voici donc cinq bonnes raisons pour apprendre la langue arabe quel que soit notre âge (promis, je vais m'y mettre !).
1 : C'est bon pour les neurones…
D'après une étude menée par des neuroscientifiques de l'Université de Pennsylvanie et publiée en novembre 2014 dans le Journal of Neurolinguistics, apprendre une langue étrangère accroitrait l'activité cérébrale et améliorerait la mémoire. Ainsi, les enfants européens ayant appris le chinois, le russe ou l'arabe dès leur plus jeune âge montrent une meilleure mémoire et un niveau scolaire plus avancé que leurs camarades monolingues. Une recherche publiée un an plus tard par l'Université d'Édimbourg conclut que l'apparition de la maladie d'Alzheimer et le vieillissement des neurones peuvent être retardés d'au moins quatre ans par l'apprentissage d'une nouvelle langue – surtout si celle-ci est complexe (par complexité, on entend différent de notre langue maternelle tant au niveau alphabétique que phonologique, lexical et grammatical). Enfin, la connaissance d'une nouvelle langue dite difficile est valorisant pour notre psyché et dope notre confiance en soi, c'est en tout cas la conclusion du journal Penser et Agir qui se base sur une étude psychologique.
2 : Et pour votre culture générale.
Le génie arabo-musulman a inondé des domaines aussi variés que les sciences naturelles, les mathématiques, la médecine, la philosophie, la spiritualité, la poésie. Des milliers d'ouvrages ont été écrits durant toute l'époque médiévale (et par la suite) dans cette langue qui servit de lingua franca au monde musulman dont il constitue un ciment identitaire. Mais, seuls 10% des œuvres scientifiques (et seulement 1% des œuvres spirituelles) ont été traduites dans les autres langues. Une immense partie de ce savoir reste donc immergée pour les non-arabophones. Apprendre l'arabe, c'est obtenir la clé d'une bibliothèque riche et ornée dont la porte nous était jusque là close.
3 : Vous connaîtrez mieux le monde et la culture arabes.
L'apprentissage de la langue arabe ne constitue pas seulement la mémorisation de règles orthographiques et grammaticales mais nous permet d'entrevoir une culture totalement différente de la nôtre, et la manière dont raisonnent les personnes issues de cette culture. C'est un fait qui se passe de tout jugement : l'Occident et le monde arabo-musulman sont limitrophes et entretiennent un contact pluriséculaire émaillé tour à tour de conflits et d'ententes cordiales : Croisades, échanges culturels, colonisation, immigration, partenariats économiques… Or, il est toujours sain de connaître son voisin, ne serait-ce que pour ne pas le juger à la hâte sans savoir le signification de ses actes et propos. L'apprentissage de l'anglais et du français est en plein boom dans les pays arabes : ne serions-nous pas avisés de porter quelque intérêt à la langue d'Avicenne et d'Omar Khayyâm ? A n'en pas douter, un intérêt culturel réciproque entre l'Occident et le monde arabo-musulman serait à même de combler la brèche entre ces deux civilisations, ne serait-ce qu'en permettant à chaque partie de connaître l'autre plus en profondeur.
4 : L'arabe est une langue internationale,
L'arabe est la langue officielle de 27 pays à travers l'Afrique et le Proche et Moyen-Orient entre lesquels il constitue un lien indéfectible. Selon le classement de l'ONU, l'arabe est la quatrième langue la plus parlée au monde avec plus de 350 millions de locuteurs, soit plus que l'hindi, le français et le russe. Lorsque l'on évoque l' "arabe", il s'agit en fait de l'arabe classique (dit aussi arabe littéraire) utilisé dans les médias, les institutions, les affaires et le domaine religieux. Il est évidemment compris par tous les locuteurs arabophones puisque c'est la seule version de l'arabe enseignée dans les écoles. A cela se superpose un myriade d' "arabes dialectaux", ou langages populaires, qui sont spécifiques à un pays ou à une région. Ainsi l'arabe populaire d'Algérie est diamétralement différent de l'arabe dialectal syrien ou saoudien. Les amoureux de la langue arabe complètent malgré tout leur apprentissage par une initiation à l'arabe égyptien en raison de sa portée (80 millions de locuteurs, soit l'arabe dialectal le plus parlé), de sa richesse lexicale, de l'attrait qu'exerce l'Égypte et de sa florescence culturelle : la plupart des films et des chansons qui circulent dans le monde arabe sont interprétés en arabe égyptien. Malgré tout, l'arabe classique suffit à se faire comprendre dans l'ensemble du monde arabophone.
5 : Et une future langue des affaires !
Les pays du Proche et Moyen-Orient bénéficient d'une position géographique et politique hautement stratégiques et ils sont porteurs de projets économiques majeurs. A travers le sport, le pétrole, la finance et les télécommunications, les pays du Golfe ont imprimé leur marque dans le monde des affaires. Ce boom économique ne semble pas prêt de se tarir, selon la dernière étude du cabinet de stratégie économique PwC, laquelle table sur un développement majeur des pays tels que l'Égypte et les États du Golfe. Le Nigéria semble aussi sortir son épingle du jeu : 22ème puissance mondiale en 2018, il devrait passer à la 14ème place dans les trois prochaines décennies. Cette croissance économique des pays arabophones effraie nombre d'entrepreneurs occidentaux : elle devrait pourtant nous apparaître comme un filon à saisir, capable de nous pousser vers le haut (d'autant plus que les mêmes études prévoient un effondrement économique des pays européens). L'entrée du monde arabe dans la modernité économique crée pour les Européens de nombreuses perspectives d'emplois. Or, quoi de mieux que la maîtrise de la langue arabe pour travailler aux côtés d'entreprises arabophones ? Même si ce n'est pas une obligation, c'est un vecteur incontestable de promotion professionnelle, à l'image de l'anglais aujourd'hui.
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